Il y a une sorte de mysticisme liée aux visites en Israël, qu’on soit chrétien ou non. Tout le monde m’a dit que j’allais adorer ou même que je serais profondément ému en visitant ce pays. Cela n’a pas été le cas pour la plupart du temps. Alors, c’est peut-être lié au fait que nous n’avons eu que trois jours pour réellement visiter et que tout était un peu en survol, mais ce qui était évident pour moi, et renforcé durant ma visite, c’est que l’expérience que chacun aura de ces lieux dépendra profondément de leurs convictions théologiques. Si on est Juif orthodoxe pratiquant, la terre a un sens propre très fort (et encore, au sein de ce groupe, il y a des opinions très différentes sur la situation présente) ; les musulmans, les catholiques et orthodoxes donnent aussi une importance à ces lieux pour y faire leurs cultes, en y plaçant une église ou une mosquée à chaque endroit qu’ils ont pu. Les chrétiens dispensationnalistes sionistes voient en l’établissement de l’état-nation israélien un accomplissement de prophétie biblique en temps réel.
Je ne peux m’identifier avec aucun de ces groupes, mais ma visite de Jérusalem fut certainement intéressante, enrichissante et même, oui, émouvante à quelques moments. L’importance centrale que je donnerais à cette région serait historique, archéologique et culturelle. Il est très intéressant de se promener dans un pays où la langue dominante est l’hébreu, d’apprendre à connaître les diverses cultures juives et arabes qui s’y trouvent, d’observer comment les différentes cultures et les différents cultes coexistent bien ou mal, et d’apprendre l’histoire des lieux. Surtout, je suis reconnaissant du fait que le gouvernement israélien donne les moyens à l’archéologie de se développer, ce qui n’a pas pu avoir lieu pendant très longtemps, et justement, cela se voit, comparé à des villes comme Rome ou Athènes.
Deux des guides que nous avons eu ont posé la question “pourquoi pensez-vous que cette ville est si sainte?” Ma réponse est… elle ne l’est pas. Et dire autrement serait aller à l’encontre des premiers chrétiens, tous Juifs qui, en ayant reçu le salut à travers Jésus, ont vendu leurs terres pour aller prêcher l’évangile à toutes les nations. Ce serait aussi aller contre le témoignage de l’Ancient Testament, qui identifie le lieu saint comme là où la présence de Dieu réside ; contre Jérémie, qui met en garde contre l’idée que Dieu donne de l’importance à un lieu juste parce qu’une fois, il y a résidé, indépendamment de comment le peuple se comporte (cf. Jérémie 7.1-20). Le mot “saint” signifie quelque chose: mis à part pour l’oeuvre de Dieu, ou pur. L’Eglise est le centre de l’activité de Dieu, mise à part pour son oeuvre, pour être son temple dans le temps présent, comme nous l’enseignent Pierre (1 Pierre 2.4-12), Paul (1 Corinthiens 6.19) et l’auteur d’Hébreux, qui nous dit, en parlant d’Abraham :
“C’est par la foi qu’il est venu s’installer dans le pays promis comme dans un pays étranger. Il y a habité sous des tentes, ainsi qu’Isaac et Jacob, les cohéritiers de la même promesse, car il attendait la cité qui a de solides fondations, celle dont Dieu est l’architecte et le constructeur. […] C’est dans la foi qu’ils sont tous morts, sans avoir reçu les biens promis, mais ils les ont vus et salués de loin, et ils ont reconnu qu’ils étaient étrangers et voyageurs sur la terre. Ceux qui parlent ainsi montrent qu’ils cherchent une patrie. S’ils avaient eu la nostalgie de celle qu’ils avaient quittée, ils auraient eu le temps d’y retourner. Mais en réalité, ils désirent une meilleure patrie, c’est-à-dire la patrie céleste. C’est pourquoi Dieu n’a pas honte d’être appelé leur Dieu, car il leur a préparé une cité.” Hébreux 11.9-10, 13-16.
Toutefois, comme je l’ai dit, ce pays mérite d’être visité et est important parce qu’on y trouve les sites où Abraham a marché, où Josué a conquis, où David a fui Saül, puis conquis Jérusalem pour y construire son palais dont il y a les ruines aujourd’hui, où Esaïe à prophétisé la victoire de Dieu sur Sanchérib le roi d’Assyrie… où les Essenes ont vécu et caché les copies les plus anciennes de l’Ancien Testament que nous avons et, bien sûr, où Jésus a marché. J’ai eu la petite larme à l’oeil sur le Mont des Oliviers en imaginant Jésus qui faisait son discours face à Jérusalem, avec ses disciples, prophétisant la destruction du temple, où aujourd’hui se trouve une mosquée. Mais cela dit, nous devons nous garder de l’idolâtrie en toutes ses formes, même géographique, et reconnaître que les derniers ordres de Jésus sont les suivants, et pas autre chose :
“Faites de toutes les nations des disciples, baptisez-les au nom du Père, du Fils et du Saint-Esprit et enseignez-leur à mettre en pratique tout ce que je vous ai prescrit. Et moi, je suis avec vous tous les jours, jusqu’à la fin du monde.” Matthieu 28.19-20